Aviation civile : Opération déplumage de notre Paille en queue

Dans le monde de l’aviation civile, on assiste actuellement à une guerre sans relâche des grandes alliances mondiales, notamment Star Alliance, Skyteam, Oneworld et sans oublier le grand solitaire Emirates. Face à ces moyens impressionnants, un handicap géographique et ne pouvant bénéficier d’une économie d’échelle, notre paille en queue demeure une proie facile pour les vautours du ciel.

Ce n’est guère un secret qu’Emirates ambitionne de faire du Golfe, le Yalta du ciel. Avec une croissance de 20 % par an depuis 2001 et  leur modèle économique, qui vise à relier n’importe quelle ville du monde à une autre avec une seule correspondance, Dubaï. En misant sur le soutien  direct de l’État actionnaire et ses coûts faibles, Emirates arrive à proposer une qualité de service tant à bord que dans les aéroports. Hormis ces avantages démesurés, Emirates peut compter sur une structure de lobbying intense dans plusieurs pays de la région, comprenant de politiciens, technocrates et agences de Com royalement récompensés.

 

Duel Dubai-Singapore

Des années durant, Air Mauritius a été l’otage de l’agenda de certains hôteliers ou encore gangrené par une politique malsaine, impliquant les dirigeants politiques ainsi que des regroupements obscurs en interne. Voilà maintenant qu’elle risque d’être paralysée par la maladresse de certains politiciens. En octobre 2015, afin d’offrir de nouvelles perspectives à Air Mauritius, le Premier ministre Sir Anerood Jugnauth aux côtés de l’état-major de la compagnie nationale d’aviation et de Georges Chung Tick Kan, économiste et membre du National Advisory Council (NAC) sur la compagnie aérienne régionale, annonçait l’accord avec l’aéroport Changi, pour la création d’un couloir aérien reliant l’Asie à l’Afrique en passant par Maurice. Un projet jugé bénéfique par l’ensemble de la communauté des affaires. 

 

La réplique d’Emirates n’a su tarder. En novembre, c’est Sheikh Ahmed Bin Saeed Al Makhtoum, en personne qui reçoit une délégation mauricienne composé de SAJ et l’indispensable Showkutally Soodhun et l’incontournable Roshi Badhain. Dès leur retour, le tandem Soodhun et Badhain  s’empressent d’annoncer publiquement des accords conclus. Cela alors qu’une source nous confirme que le président d’Emirates avait indiqué, avoir pris bonne note des requêtes formulées par la partie mauricienne et qu’il allait indiquer sa position ultérieurement.

 

Au Paille en Queue Court, c’est le silence absolu. Chez les opérateurs du tourisme, c’est la confusion. En plus d’une décennie, Emirates n’a jamais pu faire respecter ses engagements par rapports à la promotion de l’île Maurice auprès de la clientèle arabe. Dans les milieux, on affirme que ile Maurice ne répond pas aux exigences de ce clientèle. Quant aux emplois, ce n’est certainement pas difficile de comptabiliser le nombre d’embauches des mauriciens chez Emirates au cours de ces derniers dix ans. Ce qui nous ramène aux intentions réelles d’Emirates et le poids de sa politique sur Air Mauritius. 

 

Maurice a déjà des accords bilatéraux (Bilateral Air Service Agreements – BASA) avec au moins 35 pays. Ces accords donnent le droit aux compagnies aériennes de ces pays de desservir Maurice à hauteur de 22 000 vols sur une base annuelle. Et pourtant, ces pays n’exploitent même pas 40 % de ces possibilités. Quant à Air Mauritius, en 2014, l’agence SKYTRAX a attribué 4 étoiles à ses prestations. Une distinction réservée à 31 compagnies aériennes de par le monde. Cette année, MK s’est vu attribuer trois distinctions au World Travel Awards. Preuve s’il en fallait, que le Paille en Queue n’a pas à rougir de sa position, que certains jugent pourtant dégradante.

 

Pour qui plane Soodhun

 

Les déclarations du ministre Soodhun ont donné lieu à une véritable levée de boucliers. D’ailleurs l’intersyndicale de la compagnie nationale a lancé un appel au Premier ministre afin de rétablir la situation. Selon Maheswar Ram, président de l’AMSA,  également porte-parole de l’intersyndicale « Les déclarations du ministre Soodhun sont déplorables et chacun doit assumer ses responsabilités. Il y a beaucoup qui s’interrogent sur le silence assourdissant du président du conseil d’administration. La moindre des choses c’est qu’il réagit. Cela fait 9 mois qu’Air Mauritius n’a plus de EVP HR et depuis le mois d’Août on est sans un CEO. La personne qui assume l’intérim, n’a pas les pouvoir d’agir, alors que le président du conseil refuse de rencontrer les syndicats. Actuellement c’est le flou total ». Les syndicats  réitèrent leur demande pour une enquête approfondie sur les exercices de hedging et sur les pertes d’emplois due à la sous-traitance. Ils exigent aussi que les accords avec Emirates soient rendus publics.

 

Du coté des  petits actionnaires, on fustige le ministre Soodhun. Un des actionnaires s’est même interrogé sur la question ‘pour qui plane Soodhun ?’ et, conclut que les multiples répétitions venant du ministre Soodhun à l’effet qu’Air Mauritius n’a rien à craindre d’Emirates, lui donne des sueurs froides.

Capital Media

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